Nzoy Rest in Power .

Discours prononcé en mémoire de Roger Nzoy Wilhelm à l’occasion de l’évènement Nzoy Rest in Power à Lausanne et lors de la manifestation qui a eu lieu simultanément Zurich le 30 août 2025.

English version below

Nous sommes ici pour Nzoy. 

Nous sommes ici parce qu’il y a 4 ans, ce fils, ce frère, ce compagnon, cet ami, a été abattu par la police. 

Nous sommes ici parce que cela fait 4 ans que nous luttons pour la justice et la vérité. 

Le constat est clair : notre société néocoloniale fera tout pour étouffer le crime. Les masques de l’ordre racial ne tomberont pas sans notre volonté et notre action commune. 

C’est la raison pour laquelle nous nous tenons aux côtés de la famille et des proches de Nzoy, pour briser le silence.

Le travail d’enquête populaire, mené par la commission indépendante sur la mort de Nzoy, a permis de réduire à néant le récit policier reposant sur la légitime défense. 

Nzoy n’est pas mort parce qu’il était dangereux. Il est mort parce qu’il était Noir et en détresse psychique. 

Pendant que la police suisse continue de tuer impunément dans nos rues, la classe politique blanche et bourgeoise fait mine de découvrir le racisme systémique au sein de la police lausannoise.

Que peut-on attendre d’un Etat embourbé dans le déni de son racisme? 

Alors que les corps racisés qui vivent au quotidien l’oppression de la race se révoltent, comme l’a courageusement montré la jeunesse du quartier de Prélaz à Lausanne ces derniers jours, la gauche parlementaire est scandalisée par quelques poubelles en feu. C’est une honte!

En Suisse comme ailleurs, l’offensive politique pro-flics se poursuit : l’initiative de l’UDC pour garantir l’impunité des policiers à Genève, qui sera soumise prochainement à votation, n’en est qu’une énième manifestation.

Seule la mobilisation des forces antiracistes et décoloniales permettra d’en finir avec cet ordre inégalitaire.

De la même manière que nous luttons pour la justice et la vérité pour Nzoy, nous continuerons de nous battre contre le racisme d’Etat. 

Pour Hervé, Mike, Lamin, Michael,Camila, Marvin et toutes les autres victimes.

Ni oubli, ni pardon.

No justice, no peace.   

Outrage collectif

English version

We are here for Nzoy.

We are here because 4 years ago, this son, this brother, this companion, this friend, was shot down by police.

We are here because we’ve been fighting for the past 4 years in the name of justice and truth. The conclusion is clear : our neocolonial society will do anything to cover up crime. The masks of the racial order will not fall without our will and our joint action.

This is the reason why we stand by Nzoy’s friends and family, to break the silence.

The counter-investigation on Nzoy’s death, conducted by the independent commission, has reduced to ashes the police’s version of events, which relied on a claim of legitimate defense.

Nzoy did not die because he was dangerous. He was killed for being black and in psychological distress.

While swiss police continues to kill in our streets with impunity, the white and bourgeois political class pretends to discover systemic racism within the police in Lausanne.

What could we expect from a State mired in the denial of its own racism?

While racialized bodies who experience the oppression of race daily revolt, as courageously displayed by the youth in the Prélaz neighbourhood in the city of Lausanne. Meanwhile, the parliamentary left complains about trash and car fires. What a shame!

In Switzerland, like elsewhere, the pro-cop and authoritarian offensive is at work : the initiative by UDC/SVP Genève to garantee the impunity of police officers in Geneva, that will be soon submitted to a vote, is just another example.

Only the mobilization of antiracist and decolonial forces will succeed in putting an end to this unequal order.

Just as we fight for justice and truth for Nzoy, we will continue to fight against state racism.

For Hervé, Mike, Lamin, Michael, Camilla, Marvin and all the others victims

We never forget, we never forgive.

No justice, no peace.

Outrage collectif

Campagne Justice4Nzoy

Nous soutenons le collectif Justice4Nzoy, luttant pour la vérité et la justice pour Roger Wilhelm Nzoy assassiné par la police en 2021, dans sa  recherche de soutiens financiers. La cagnotte pour la campagne se trouve ici: https://www.gofundme.com/f/fundraising4nzoy

Les bénéfices de cette campagne de l’alliance Justice4Nzoy iront aux proches de Nzoy, car …
… la famille de Nzoy doit jusqu’à aujourd’hui se battre pour obtenir un traitement juridique. Jusqu’à présent, ces efforts ont coûté environ 7’000 CHF.
… les frères et sœurs de Nzoy ont dû prouver leur relation proche avec leur frère avant de pouvoir déposer plainte. Ils ont été déboutés à deux reprises. Leur plainte élargie pour non-assistance à une personne en danger a également été rejetée, ce qui prouve la partialité du procureur.
… après plus d’un an, la vérité sur ce qui s’est passé n’a pas encore été établie. C’est pourquoi les proches de Nzoy doivent eux-mêmes engager des enquêteurs médico-légaux. La famille s’attend à des coûts de 80’000 francs.
… la famille doit partir du principe que le procureur, du fait de sa partialité, n’autorise que des expertises en faveur de la police. La famille doit donc payer elle-même les expertises supplémentaires nécessaires. Il s’agit de montants compris entre 5’000 et 10’000 francs par expertise.
…il n’est pas possible que la presse dispose de plus de preuves que le dossier du procureur.
… l’expérience a montré que le ministère public fait délibérément traîner en longueur les procès qui mettent en évidence le racisme mortel de la police. Ceci dans l’hypothèse où les plaignants manqueraient ainsi de moyens financiers. Par exemple, le cas de Mohamed Wa Baile, qui a traversé toutes les instances jusqu’à la Cour européenne, a coûté au total plus de 150’000 francs ; celui de Wilson A. plus de 500’000 francs.
… le travail de relations publiques fourni par la famille et les amis de Nzoy doit être soutenu. Ce travail important attire l’attention sur le profilage racial mortel pratiqué par la police suisse. Seulement dans le canton de Vaud, quatre hommes noirs sont décédés au cours des quatre dernières années entre les mains de la police, sans que celle-ci ne soit tenue de rendre des comptes. Jusqu’à présent, ce travail a coûté environ 15’000 francs.
Nous sommes heureuxes de chaque contribution!
MERCI !

 

Justice4Nzoy : la violence d’Etat comme réponse à un besoin de soin

Discours lu à la manifestation « contre les violences policières » du 2 avril 2022 à Lausanne.

English version follows

Pourquoi sommes-nous là encore aujourd’hui? Nous sommes là aujourd’hui, car une personne a encore été tuée par des agents de l’État.
Nous sommes là aujourd’hui, car un homme afrodescendant a encore été tué par la police suisse.

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Hervé Mandundu – 5 ans après!

Ce samedi 6 novembre 2021, nous honorerons la mémoire d’Hervé 5 ans après son assassinat. Oui, car le 6 novembre 2016 Hervé Bondembe Mandundu était tué par un  policier à Bex, à son domicile. Il y a 5 ans, la famille et les proches d’Hervé étaient restés sans nouvelles jusqu’au lendemain du meurtre. Pas un mot. Pas une excuse. Pas une explication. La famille restera ensuite sans nouvelles jusqu’à l’annonce du procès fallacieux qui se concluera en faveur de ce policier et meurtrier, indemnisé à hauteur de CHF 35’000.-. Près de 5 ans après, ni la police, ni l’État ne leur auront formulé d’excuse.

Les États occidentaux et leurs polices créent des traumatismes collectifs à leurs résident·e·x·s, à leur résident·e·x·s racisé·e·x·s, à leur résident·e·x·s issu·e·x·s de l’immigration extra-européenne. Ils se défendent de leur présence en leur faisant – par tous les moyens – porter des stigmates et la honte de leur existence. Pendant ce temps, nous enterrons nos morts.

Puis, ils s’allient. La police, la justice, les médias s’accordent à salir la mémoire de celles et ceux que nous enterrons.

Ils créent un terrain hostile à nos deuils et érigent un mur entre nous et eux. Nous soutenons la famille d’Hervé qui a dû mener sa propre bataille quand cette alliance décrédibilisait la mémoire de leur fils et les circonstances et de son assassinat auprès de la population, cherchant toute raison pour rendre ce meurtre acceptable et légitime.

Les proches d’Hervé ont continué à l’honorer, à lutter pour la vérité et à le décrire comme il était vraiment, un homme qui ne méritait pas de mourir. Hervé était un frère et un fils soutenant, c’est un réel pilier pour la famille qui a disparu. C’est avec courage que cette dernière ne s’est pas réduite au silence auquel on a tenté de la soumettre et a clamé son désir de justice.

La famille fait face à l’impunité de ce meurtre raciste. Un meurtre raciste qu’il faut désigner en tant que tel, tant les victimes sont systématiquement non-blanches. Un racisme qu’il faut nommer, tant ces violences sont la continuité des pratiques institutionnelles envers les personnes en exil et leurs descendant·e·x·s. Des violences qui reposent sur des préjugés et qui redoublent lorsque les personnes ou leurs proches s’en défendent. Des violences spécifiques et meurtrières.

Nous le savons, la survie d’Hervé n’aurait mis en péril la vie de personne et n’exposait personne à la mort, ainsi il aurait pu être évité de le tuer.

Mais la justice tremble. La justice tremble devant les éléments probants incriminant le meurtrier, pendant ce temps-là, la famille lutte. A ses côtés, nous revendiquons la Vérité face au système judiciaire, qui refuse de remplir sa mission. Nous luttons pour leur fils et pour toutes les victimes de violences policières. Nous luttons, et c’est face à nous qu’elle tremblera.

Les représentants de l’État peuvent continuer à la rendre indicible, nous, la Vérité nous la connaissons, nous nous y accrochons et nous l’aurons!
Pour Hervé! Et pour son fils!

Après ces 5 douloureuses années, nous souhaitons saluer le combat pour la justice mené par la famille Bondembe Mandundu et les proches d’Hervé. Nous souhaitons d’ailleurs saluer le combat de toutes les familles.

La vérité pour nos morts est une lutte qui marque une vie. Pour toutes ces familles, pour les proches d’Hervé et pour votre combat pour la Verité, nous vous invitons à participer à la campagne virtuelle #VéritéPourHervé :

Le 6 novembre 2021 cela fera 5 ans qu’Hervé Mandundu a été assassiné par un policier.
Faites des banderoles ou des pancartes. Prenez-les en photo, vous pouvez aussi les accrocher à votre fenêtre. Envoyez-les nous sur instagram ou par mail outrage-collectif@riseup.net et postez-les le 6 novembre avec le hashtag #VéritéPourHervé

Vérité pour toutes les victimes de violences policières !

Justice pour Nzoy, Victime du Racisme d’Etat – Discours lu à Berne le 2 octobre 2021

Le 30 août 2021, à la gare de Morges, Nzoy, un homme afrodescendant de 37 ans, vivant dans le canton de Zurich, un frère, un fils, un cousin, un ami… a violemment été tué par la police.
Alors qu’il était en détresse, un policier lui a tiré 3 balles dans le corps, sans jamais lui prêter secours, le laisant gisant sur le sol pendant plusieurs minutes.
 

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Justice pour Hervé : le combat n’est pas terminé

Plus de 4 ans après le meurtre d’Hervé Bondembe Mandundu, suite à 1 jour et demi de procès puis 7 jours d’attente, ce mercredi 31 mars la cour criminelle du Tribunal d’arrondissement de l’Est vaudois rendait son verdict. L’assassin d’Hervé a été acquitté et indemnisé de 35’000 CHF par l’État. Ce procès est le premier de trois affaires de meurtre raciste par la police romande. Nous avons encore une fois la preuve que les non-blancs doivent se battre deux fois plus pour leur justice et pour leur dignité. Nous sommes prêt-e-s.

N’oublions jamais, Hervé Bondembe Mandundu était un homme noir de 27 ans, père de famille et comme on dit au Congo : « l’enfant de quelqu’un ». Il a été abattu à balles réelles par un caporal de la Police du Chablais vaudois – lui-même accompagné de 4 de ses coéquipiers formés et entraînés – la nuit du 6 novembre 2016 au cours d’une intervention de routine à Bex. Le caporal, devenu sergent depuis le meurtre, a tiré 3 balles dans le corps d’Hervé, dont deux qui lui ont été fatales.

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Affaire Hervé Mandundu: Procès, jour 2

« J’ai 6 millions de raisons de perdre la mienne
Le système développe trop de pièges
Les gars racistes occupent trop de sièges ».
Lunatic – Civilisé

Les gars racistes occupent trop de sièges et leur soi-disant neutralité, hégémonique et blanche, est du côté du tueur. Qu’est-ce qui motive leur enquête? Quel est l’angle privilégié? Où est donc passée cette soit-disant neutralité suisse? Est-il si difficile d’accepter, qu’en Suisse aussi, des policiers blancs tuent des hommes noirs?

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Affaire Hervé Mandundu: Procès, jour 1

Toute la police est violente jusque dans ses regards et ses silences¹. Et c’est dans ces multiples regards et silences que le procès du tueur de Hervé Mandundu a commencé. Aux quatres coins du bâtiment, des groupes de policiers en uniforme errent dans un silence complice.

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Ils ne veulent pas dire pardon

Poème écrit et lu dans le cadre du mémorial pour toutes les victimes de violences policières : Sag ihre Namen! du 20.03.2021 organisé par Allianz Against Racial Profiling à l’occasion  de la journée internationale de lutte contre les violences policières.


Ils savent ce qu’ils ont fait
Et ils ne veulent pas dire pardon

On s’est rencontrés
On avait plus ou moins 12-13 ans
On avait le privilège de l’insouciance

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Affaire Hervé Mandundu : Le procès a enfin lieu

Enfin.

Plus de 4 ans après la mort d’Hervé Mandundu, tué sous les balles de la police cantonale vaudoise, le procès aura finalement lieu. Rappelons les faits. La nuit du 6 au 7 novembre 2016, 5 policiers intervenaient dans l’immeuble d’Hervé, suite à un appel pour tapage nocturne. Selon la version policière, Hervé les aurait agressé pendant son interpellation, ce qui aurait justifié que l’un d’entre eux – le caporal – lui tire à moins d’1m de distance trois balles dans le corps dont deux lui seront fatales. Les voisins d’Hervé ont démenti la présumée agressivité de la victime lors de l’intervention. C’est donc dans ces circonstances improbables que l’intervention de cinq agents de police entrainés et diplômés aura lieu. Cinq agents face à Hervé dans cet immeuble, qui en mourra. Il était seul, âgé de 27 ans, et père d’un jeune enfant.

Ce n’est que le lendemain matin, le 7 novembre aux alentours de 10h, que des agents de police viendront annoncer la mort d’Hervé à ses parents. Après ces évènements dramatiques, la communauté congolaise et leurs soutiens ont manifesté dans les rues de Lausanne pour dénoncer le racisme et le profilage racial imprégnant cette affaire. Cette mobilisation a rassemblé plus de 1000 personnes. Les revendications étaient claires: le droit à la vérité et la justice, contre les crimes policiers. Cette mobilisation a marqué un soutien pour toutes les victimes de violences policières et leurs proches, sous la pluie de slogans scandés par les manifestant·e·x·s: la vie des noir·e·x·s compte. Un an après la mort d’Hervé, la famille nous a livré un témoignage poignant:

« C’est vraiment trop long une année, nous n’avons même pas de réponse. Ce qui nous touche, ce qui nous fait mal surtout, c’est qu’on a reçu aucune visite des autorités, même pas un courrier pour avoir au moins de nos nouvelles. »

« Ce qui me fait peur c’est de voir combien de famille subissent ça, et ce que la police a semé dans la vie de nos enfants et les répercussions sur le long terme. On ne peut pas faire notre deuil. Le policier, il vit sa vie, il travaille et nous on est là, on est condamnés, on attend. On est là, comme des animaux quoi. C’est lui qui a plus de valeur que nous, c’est le policier. »

 

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