La Loi des Mesures Policières de lutte contre le Terrorisme (LMPT) est présentée comme un moyen de prévenir l’extrémisme violent, de détecter de façon précoce les signes de radicalisation et de lutter contre le terrorisme par le renforcement de la répression pénale et administrative. Elle donnerait une base légale pour que la police et la justice puissent aussi intervenir de façon préventive, c’est à dire sans qu’aucune infraction n’ait été commise, aucun préjudice, ni qu’aucun jugement n’ait été donné. Ici, les intimidations et les mesures pour l’exemple suffisent à se justifier.
La LMPT est une loi raciste. Elle renforce des mécanismes d’oppressions déjà en place et institutionnalise la suspicion et la présomption de culpabilité sur certaines populations non-blanches et les classes populaires. Elle nous rend témoins du renforcement d’un tri sélectif de bon et mauvais résident·e·x·s et de l’injonction à correspondre à la blanchité. Elle fait de la Suisse une société de contrôle, qui encourage la délation, la surveillance et les pratiques déshumanisantes sur les personnes racisées, les personnes musulmanes, les personnes étrangères et les personnes de classe populaires.
Elle s’inscrit dans une logique de politique de la peur qui projette sur certaines populations un profil criminel. Un musulman est un potentiel terroriste, un pauvre est un potentiel séditieux.
La Suisse motive l’institution de la LMPT par la protection de ses valeurs, comme lorsque l’on vote pour interdire des minarets qui n’existent quasiment pas et que personne ne prévoit de construire ou que l’on interdit une burqa que seules quelques dizaines de personnes portent.
La mobilisation de l’appareil politique national se fait sur la crainte des étranger·e·x·s non-blanc·he·x·s dans un seul but populiste.
Il s’agit de faire vivre une partie de la population sous un régime de crainte et de répression afin de rassurer un électorat raciste et nationaliste.
Cette loi attaque alors celles et ceux qui remettent en cause l’État et ses valeurs.
Et nous, nous remettons en cause l’État et ses valeurs.
Car ne nous y méprenons pas, les valeurs de l’État ne sont pas la solidarité, l’entraide et l’égalité, c’est plutôt l’enfermement des étrangers, les meurtres policiers, le profilage racial et l’islamophobie institutionnalisée.
Alors oui, ces valeurs–là nous les combattons et s’il faut encore et encore le répéter, nous utiliserons tous les moyens nécessaires et disponibles.
Rappelons nous que cette année à Lausanne, l’homme qui a tué Hervé Mandundu a été récompensé par la police avec une promotion et dédommagé par la justice de plusieurs milliers de francs.
Rappelons-nous qu’en 2018, quelques mois après le meurtre de Mike Ben Peter par un policier, la municipalité de Lausanne a lancé une opération policière toujours en cours aujourd’hui dans les seuls buts de contrôle, de surveillance et de harcèlement des hommes noirs.
Rappelons-nous les violences quotidiennes perpétrées par les entreprises Securitas et Protectas dans les Centres Fédéraux de Neuchâtel, de Fribourg, de Bâle, de Zürich, avec la complicité du Secrétariat d’état à la Migration.
En dehors de ses frontières, la Suisse participe à l’exploitation du Sud Global, l’extraction de matières premières, le déplacement des peuples, le trafic d’armes international avec des pays comme l’Israël et les Etats-Unis. C’est ces valeurs–là que cette loi défend.
Mais ces valeurs–là, ce sont elles qui sont terroristes! Qui détruisent des peuples, tuent ou asservissent des enfants, participent aux violences sexuelles comme arme de guerre. Face à ces valeurs occidentales et coloniales, oui, nous nous radicalisons. Y a quoi?!
Cette loi parle de terrorisme mais l’on sait d’avance qu’elle ne visera pas les enfants de l’occident blanc et chrétien. Un·e·x terroriste, ils savent déjà qui c’est. Et ce ne sera pas ce néo-nazi qui videra son chargeur sur une mosquée pour défendre sa prétendue civilisation.
La nation se place, dans le cadre de cette loi, en victime. Elle serait paraît-il cible d’attaque. Nous on ne les voit pas ces attaques. La Suisse se plaint et se victimise. Nous on sait et vous aussi vous savez qui sont les victimes dans le système d’exploitation actuel et que cette loi légitime la violence à l’encontre des personnes issues de l’immigration et de leur descendance en pointant du doigt un présumé danger intérieur duquel il faut se prémunir.
Cette loi tente de nous mettre une disquette, elle s’éloignerait soi-disant du carcéral. Mais les mesures qu’elle instituerait comme l’assignation à résidence, le pointage, la restriction des contacts sociaux sont des mesures d’enfermement. Elle arrive comme si toutes les technologies et les légalisations existantes ne permettaient pas de lutter contre les attaques terroristes. On se rappelle pourtant qu’en 2015, la Suisse avait déjà déboursé plus de 5 millions de francs pour l’exercice Conex 15 visant à se défendre contre l’invasion et l’entrée en Suisse de personnes indésirables. Ou encore, la récente entrée en vigueur de Loi fédérale sur la surveillance de nos courriers et de nos téléphones.
Et maintenant ils menacent les enfants qui dès 12 ans pourraient se voir infliger ces mesures. Ils ne connaissent pas la honte.
On vit dans un monde en perpétuel changement. Un monde qui s’est soulevé suite à l’assassinat de Georges Floyd. On a parlé d’abolir la police, les réformistes ont parlé de lui enlever des moyens matériels et d’action. Et en Suisse – comme des énormes bouffons réactionnaires – on nous amène aujourd’hui une loi qui vise à renforcer l’appareil policier. Cette loi n’est ancrée dans aucune réalité, n’a que des critères délibérément floues. Elle émane d’une fiction raciste et ultra sécuritaire. C’est ça l’extrémisme.
On pourrait croire qu’après avoir attaqué directement les femmes avec l’initiative contre la burqa l’État ne s’attaque aujourd’hui qu’aux hommes, mais c’est faux.
Les mesures policières et carcérales concernent tout le monde. Les visites en prison, l’accompagnement solidaires des mesures d’assignation à résidence, l’aide matérielle aux enfermé·e·x·s, la charge mentale et émotionnelle crée par le tout carcéral sont aussi et surtout une affaire de femmes.
S’opposer à cette loi, c’est porter une position antiraciste et féministe.
Cette loi va à l’encontre de toute justice sociale, elle renforce les inégalités et est par essence, séparatiste.
Les mesures prévues par cette loi s’attaque aussi aux liens familiaux, amicaux et amoureux. Elle permettrait la mise en place d’un dispositif d’isolement qui couperait les personnes visées de leurs réseaux quels qu’ils soient. Par là, elle s’attaque aussi à nos liens de complicités militantes et provoquerait des ruptures sociales.
Cette loi s’attaque à la sécurité des plus précarisé·e·x·s. Ceux et celles qui mettent leur vie en jeu sur le chemin de l’exil vont être confronté·e·x·s à des difficultés supplémentaires, au péril de leur vie.
Nous, militant·e·x·s antiracistes radicaux issus de l’immigration sommes doublement visé·e·x·s. Visé·e·x·s à cause de notre race ou de notre foi mais aussi visé·e·x·s à cause de notre désir profond de renverser le système en place patriarcal et capitaliste.
L’appareil judiciaire érige l’Etat en victime alors que tout deux participent à la criminalisation arbitraire, à la stigmatisation de groupe sociaux et à la détérioration de la santé mentale.
Outrage Collectif contre l’enfermement !
Outrage Collectif contre la discrimination et le racisme !
Outrage contre la LMPT